PHILIPP MUELLER, CEO BLUEORCHARD: «Rendre les solutions d’investissement à impact accessibles à tous»

Le CEO de BlueOrchard en visite au Luxembourg a parlé de l’actualité de sa société à Paperjam et s’est livré à un tour d’horizon des dernières tendances en matière d’investissement à impact.

BlueOrchard est un gestionnaire d’investissement d’impact mondial de premier plan. En 2001, fondée à l’initiative de l’ONU, l’entreprise a commencé en tant que gestionnaire commercial d’investissements en dette de microfinance dans le monde. Depuis 2019, la firme est membre du groupe Schroders. En 20 ans d’existence, BlueOrchard a investi plus de neuf milliards de dollars dans plus de 90 pays et a permis à 230 millions d’individus d’accéder à des services financiers dont ils étaient exclus et gère le plus grand fonds de microfinance au monde. La société emploie 125 employés de 38 nationalités différentes.

BlueOrchard, basée en Suisse avec un siège européen installé au Luxembourg, est principalement active dans les marchés émergents et les marchés dits frontières. Ce terme désigne un ensemble de pays émergents ayant un marché financier établi, mais dont la capitalisation boursière et la liquidité restent faibles. En théorie, ils offrent un potentiel de croissance plus important que les marchés développés, tout en étant décorrélés des marchés développés et émergents. Avec cependant un profil de risque plus élevé.

«Nous sommes des investisseurs globaux qui se focalisent sur les marchés émergents. C’est là que nous pouvons générer le plus d’impact par dollars investis», explique Philipp Mueller, le CEO de BlueOrchard. «Nous sommes devenus l’un des principaux gestionnaires mondiaux d’investissements à impact, mettant en relation des millions d’entrepreneurs des marchés émergents et frontières avec des investisseurs. Notre objectif est de rendre les solutions d’investissement à impact accessibles à tous et de faire progresser l’utilisation consciente du capital au profit de la société et de l’environnement. Nous avons quatre équipes régionales; une à Lima au Pérou qui couvre l’Amérique latine, une à Nairobi au Kenya pour couvrir l’Afrique, une à Tbilissi en Géorgie pour couvrir l’Europe Centrale et une à Singapour pour couvrir l’Asie.»

Diversification dans la dette privée

Le métier de base de BlueOrchard, c’est la microfinance orientée impact. Un secteur résilient qui a bien résisté à la crise du Covid. Ce qui n’empêche pas l’entreprise de diversifier son offre.

Suite à son rapprochement avec Schroders, BlueOrchard a lancé une stratégie obligataire d’impact climatique conforme aux normes UCITS. L’entreprise a également ajouté deux classes d’actifs à son offre: le private equity et le financement d’infrastructures durables. «Après tout, la microfinance, c’est de la dette privée, tout comme le private equity et l’investissement dans les infrastructures. Nous transposons notre expérience pour financer par la dette des projets de taille moyenne d’infrastructures dans les marchés émergents. Des projets trop petits pour que les grands acteurs investissent et trop grands pour être financés localement», explique Daniel Perroud, global head of business and member of executive management.

«Dans toutes nos activités, notre approche consiste toujours à apprécier sur une base également le risque financier et l’impact de nos investissements. Si un projet avec un impact fort, mais on n’est pas compensé financièrement pour ce risque, on va le rejeter. De même, si un projet à un fort rendement, mais un impact insuffisant, on va le rejeter aussi. Ces deux critères sont utilisés pour tous les investissements que l’on fait. Avec l’objectif de générer du rendement pour nos investisseurs et de dégager un impact social, environnemental sur le terrain», poursuit Philipp Mueller. Pour qui cette approche de «double bottom line» est «ce qui nous différencie vraiment de la philanthropie qui regarde uniquement à l’impact social sans regarder au rendement financier».

Le moteur des infrastructures vertes

La croissance de l’investissement d’impact, BlueOrchard la voit dans trois tendances lourdes.

D’abord dans l’accélération du rythme de la numérisation dans beaucoup de domaines. «Une tendance clé.» Philipp Mueller constate également une progression de la demande d’infrastructures vertes et durables. «Les technologies sont devenues moins chères et éprouvées et, bien sûr, de nombreux pays veulent réduire leur dépendance à l’égard de l’énergie et des combustibles fossiles. Les thèmes de l’énergie et de l’indépendance énergétiques vont devenir de plus en plus importants pour les investisseurs.»

Et selon lui, la guerre en Ukraine va faire accélérer le mouvement. Une guerre qui pourrait, «pour un certain temps», faire passer au second plan les préoccupations de développement durable.

La pandémie du Covid a accéléré la demande d’investissements sociaux, «un domaine jusqu’alors peu considéré par les investisseurs».

La troisième tendance est celle de la demande accrue de ce type d’investissements émanant tant des investisseurs privés qui cherchent à donner du sens à leur agent que des investisseurs institutionnels.

La diversification opérée vers les marchés privés permet également de bénéficier d’un intérêt accru de la part d’investisseurs soucieux de diversifier leurs expositions et de se décorréler des marchés publics.

Une méthodologie éprouvée

Comment BlueOrchard concilie-t-il rentabilité et impact? «La chose la plus importante est d’avoir des gens sur le terrain pour trouver le bon projet sur le marché. Prenez les infrastructures: les besoins sont évidents lorsque vous voyagez dans nos pays cibles et les retours potentiels financiers et sociaux apparaissent comme évidents.» Ce qui n’empêche pas une approche d’investissement très structurée. «Notre approche est agnostique de tout indice», insiste Philipp Mueller. «Nous sommes très équilibrés en ce qui concerne l’aspect risque/rendement de l’actif et la dimension impact. Nous avons notre propre équipe qui a développé ces 20 dernières années sa propre grille de mesure d’impact environnemental et social. Nous sommes d’ailleurs en pointe sur ce sujet et nous avons contribué à la plupart des méthodologies qui existent. Notre méthodologie de mesure d’impact est vraiment une de nos forces.»

Source : Paperjam

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