La recherche de rendements sur le marché des changes par Luc Luyet & Alessandro Cortese, Pictet Wealth Management

Point de vue de Luc Luyet et Alessandro Cortese, tous deux stratégistes devises chez Pictet Wealth Mangement, estimant que tant que l’appétit pour le risque au niveau mondial est résistant, la recherche de rendements par les investisseurs devrait continuer à favoriser les monnaies de matières premières à rendement élevé

Les devises des fournisseurs de matières premières sécurisées, comme la couronne norvégienne et le dollar canadien, joueront un rôle dans la solution éventuelle pour l’indépendance énergétique de l’Europe vis-à-vis de la Russie. Cela va dans le sens de notre thème d’investissement 2022 La répression des revenus se poursuit autour de la recherche de revenus dans un environnement à faible rendement, car les monnaies cycliques de haute qualité peuvent offrir un taux d’intérêt intéressant pour leur détention et peuvent également offrir des avantages en termes de diversification de portefeuille.

Pour les investisseurs qui recherchent activement des sources alternatives de revenus, une stratégie populaire sur les marchés des changes consiste à investir dans des devises à haut rendement, financées par la vente de devises à faible rendement. Ces dernières années, les opportunités pour cette stratégie de portage ont été limitées étant donné que les taux directeurs de la plupart des économies développées étaient proches de leur limite inférieure. Toutefois, depuis le second semestre 2021, quelques grandes banques centrales ont adopté une attitude plus belliqueuse, tandis que d’autres sont restées accommodantes, cultivant ainsi un sol plus fertile pour ces stratégies de portage. Ces monnaies à haut rendement ont également tendance à provenir de pays qui sont des exportateurs nets de matières premières, dont les prix ont largement augmenté ces derniers temps.

Parmi ces devises à haut rendement, nous avons tendance à préférer les devises sensibles au pétrole des pays producteurs de matières premières sécurisées, comme la couronne norvégienne et le dollar canadien. Nous pouvons nous attendre à ce que ces deux pays jouent un rôle essentiel dans la solution finale à l’indépendance énergétique de l’Europe vis-à-vis de la Russie. Alors que la transition verte a découragé les investissements dans la production de combustibles fossiles, ce changement structurel de la demande européenne d’énergie devrait renforcer la forte demande de pétrole et de gaz norvégiens et canadiens au cours des années de transition intermédiaires, étant donné le faible nombre de fournisseurs d’énergie alternatifs fiables et l’offre encore limitée d’énergies renouvelables.

La Norvège étant l’un des plus grands exportateurs d’énergie au monde en termes de pourcentage du PIB, les prix élevés actuels du pétrole et du gaz devraient apporter un soutien supplémentaire à la couronne. Nous avons également constaté une amélioration significative de la balance commerciale du Canada, qui pourrait se poursuivre si les prix du pétrole restent élevés.

En outre, les prix élevés de l’énergie auront des retombées positives pertinentes sur les perspectives de croissance intérieure de la Norvège et du Canada, grâce à l’augmentation des investissements dans le secteur du pétrole et du gaz, ce qui favorisera l’emploi, la croissance des salaires et le resserrement de la politique monétaire.

Si la balance commerciale australienne s’est également améliorée, son évolution est moins impressionnante que celle de la Norvège ou du Canada, car l’Australie exporte principalement du charbon et du fer et importe des produits pétroliers. Parallèlement, la balance commerciale de la Nouvelle-Zélande ne soutient pas le dollar néo-zélandais, car le pays exporte principalement des produits laitiers.

En ce qui concerne le portage, il existe également certains facteurs distinctifs entre les monnaies des matières premières. La Norges Bank a été la première banque centrale des marchés développés à relever ses taux d’intérêt, tandis que la Banque du Canada et la Banque de réserve de Nouvelle-Zélande ont également déjà entamé des cycles de resserrement et signalé de nouvelles hausses de taux, compte tenu des fortes pressions inflationnistes. La Reserve Bank of Australia (RBA) s’est montrée plutôt patiente jusqu’à présent, n’ayant pas encore entamé de cycle de resserrement. Cela dit, compte tenu de l’étroitesse du marché du travail australien et des pressions inflationnistes croissantes, la RBA pourrait devenir plus belliciste et commencer à relever les taux d’intérêt dans les mois à venir.

Graphique : L’augmentation de l’écart de taux directeur rend la stratégie de portage plus attrayante | Stratégie de portage basée sur les devises développées par rapport à l’écart de taux directeur dans les économies développées

Dans l’ensemble, tant que l’appétit pour le risque au niveau mondial est résistant, la quête de rendement des investisseurs devrait continuer à favoriser les devises à haut rendement, tandis que la diversification structurelle de la demande d’énergie en provenance d’Europe pourrait alimenter certains investissements dans la production d’énergie élargie. Nous voyons des facteurs plus favorables à la couronne norvégienne et au dollar canadien qu’aux monnaies des Antipodes, compte tenu de la composition de leurs exportations et des partenariats commerciaux plus étroits qu’ils entretiennent avec l’Europe.

*Stratégie de portage du G10 basée sur l’achat des trois devises du G10 ayant le taux à court terme le plus élevé par la vente des trois devises du G10 ayant le taux à court terme le plus bas.

Ecrit par Luc Luyet & Alessandro Cortese, Currencies Strategists chez Pictet Wealth Management

LinkedIn
Share